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L'ATTITUDE DU CORPS
PENDANT
LES OFFICES LITURGIQUES
L'attitude du corps pendant la célébration de la Messe et des Vêpres
n'est pas indifférente au bon succès de la prière en commun (i)
aussi l'Église a-t-elle pris soin d'en formuler les règles en se basant
sur des traditions vénérables. Elle a jugé, non sans motif, que l'uniformité
des mouvements du corps a sa répercussion sur l'harmonie
des sentiments, et que cette harmonie est une des conditions pour
que notre prière soit exaucée « Si deux d'entre vous s'accordent sur
la terre, quelque chose qu'ils demandent, ils l'obtiendront de mon Père
qui est dans les cieux (2). » La parole du Sauveur n'en sera que mieux
réalisée quand l'accord existera dans les dispositions extérieures aussi
bien qu'intérieures de toute une communauté de fidèles.
I. QUELLES PEUVENTÊTRELESDIVERSESATTITUDESdu corps dans LA
prière ? La variété de ces attitudes nous montre que toutes sont
compatibles avec l'exercice de la prière ou élévation de l'âme vers
Dieu. Chacune d'elles a cependant un sens mystique qui en donne la
raison d'être. i. On prie assis, et cette attitude est favorable à la
méditation l'âme est invitée à se remémorer les bienfaits de Dieu,
les préceptes divins, les moyens de les accomplir pour obtenir la réalisation
des divines promesses. David, l'auteur du plus grand nombre
de nos psaumes, nous en offre un exemple un jour que, dans
son palais, il s'arrêtait à la pensée de bâtir un temple au Seigneur,
Dieu lui envoya le prophète Nathan pour lui dire « Cet honneur est
réservé à votre fils, mais le trône sera affermi dans votre postérité
qui subsistera à jamais. » Reconnaissant d'une telle promesse,
David se transporte devant l'Arche, gage sensible de la présence
divine il s'assied pour exprimer ses sentiments, il demande que la
promesse divine reçoive son acccomplissement et que le nom de
( i) Les philosophes eux-mêmes le reconnaissent. Joubert a écrit: « Les évolutions
religieuses comme les processions, les génullexions, les inclinations du corps et de
la tête, la marche et les stations, ne sont ni de peu d'effet, ni de peu d'importance.
Elles assouplissent le coeur à la piété et courbent l'esprit vers la foi. » Joubert,
Pensées, Art. 1, n° 8a, éd. V. Giraud, Paris 1909, p. 36.
(a) S.Matthieu, XVIII, 19.
1,'ÂTTITUDE DU CORPS PENDANT LES OFFICES LITURGIQUES
Dieu soit exalté à jamais (i). C'est dans cette même attitude que
l'auteur sacré nous représente Marie et les apôtres au Cénacle, attendant
la venue de l'Esprit-Saint Au jour de la Pentecôte, l'Esprit
de Dieu remplit toute la maison où ils étaient assis (a). »
a. On prie debout, et cette attitude s'harmonise particulièrement
avec l'adoration l'étonnement et l'admiration qui saisissent l'âme
mise en face des perfections de Dieu font que l'homme se dresse sur
ses pieds comme pour mieux apercevoir ce qui est dans le lointain ou
surélevé. Zachée est ardemment désireux de voir Jésus; il sait tout
l'inconvénient de sa petite taille alors, il court en avant, monte sur
un sycomore qui lui sert de piédestal et s'y tient debout (3). Nous
avons là, comme une image de ce que l'adoration surajoute à la simple
méditation; elle est prompte, élevée, véhémente. – Le corps
debout marque en même temps le profond respect que l'on témoigne
à la personne devant laquelle on se tient, soit pour lui parler, soit
pour recevoir ses enseignements et ses ordres. Zacharie, père de saint
Jean Baptiste, est debout, à la droite de l'autel du sacrifice lorsque
l'Ange du Seigneur lui apparaît (4). Au ciel, les Anges adorateurs se
tiennent debout devant le trône de Dieu (5), de même la multitude
des élus.
3. On prie à genoux ce qui est un hommage à la divinité. « Je
suis Dieu, dit le Seigneur à son prophète, et il n'y en a point d'autre
tout genou fléchira devant moi. et toute langue donnera gloire à
Dieu, ajoute saint Paul (6). » Fléchir le genou en prononçant le
nom de JésusV c'est l'adorer comme Dieu-Homme et comme Rédempteur
(7). Par cette attitude, l'homme confesse en même temps sapro*
pre infirmité, sa condition de pécheur. Après la pêche miraculeuse
qui l'a rempli d'épouvanté, Pierre se prosterne aux pieds de Jésus et
lui dit « Eloignez-vous de moi, Seigneur, parce que je suis un
pécheur (
. »
4. Plus rarement l'homme se prosterne la face contre terre pour
mieux marquer son anéantissement, son impuissance, la honte et la
confusion que lui cause la vue de ses péchés. Jésus lui-même a voulu
prendre cette attitude quand, au Jardin de Gethsémani, il se représenta
le Calice de sa Passion on le vit alors prosterné la face contre
terre, priant et disant à Dieu « Mon Père, s'il est possible, que ce
calice passe loin de moi (9). » Parlant de cette attitude des prophètes
de l'Ancienne Loi, Origène dit qu'ils agissaient ainsi pour que les
péchas fussent plus complètement purifiés par la ruine du corps.
Notons ici que l'Église demande parfois à ses ministres de prendre
cette dernière attitude dans les offices (par ex. aux Litanies des Saints,
au jour du Samedi Saint), mais ne l'impose pas d'ordinaire aux simples
fidèles.
(1)I Paralipom.c. xvii. – (a) Act.n, 2. – (3) SAINTLuc,xix, 4-5.– (4) Saiht Luc,i,
~ii. – (5) Apocal.va, 9, et VIII,a. – (6) Isaïe, xly, aa->3; Àom.xnr,11. –
{f)Philipp. u, 10.-(
Saiht Luc,v, 8. – [9) Sajht Matthieu,xxvi,3g.
LES UÈGLES ET LES CËUVftËS
II. a – LES SIMPLES fidèles OBSERVENT-ILS avec ENSEMBLE DANS NOS
ÉGLISES CES DIVERSES ATTITUDES?
Un spectateur impartial, assistant en France à une grand'messe où
à une messe basse, le dimanche, serait assez embarrassé, sinon toujours,
du moins souvent, pour répondre à cette question. Il semble
que sous. ce rapport il y a chez certains catholiques un particularisme
exagéré, une sorte d'indépendance les uns vis-à-vis des autres que
l'on ne rencontre pas par ex. chez les protestants d'Angleterre: ainsi,
chacun prend l'attitude qui lui plaît ou qui le gêne le moins, sans se
préoccuper du voisin. Aussi quelle divergence dans les attitudes
tandis que la jeune fille et la mère de famille se tiennent à genoux
pendant la plus grande partie de la messe, ne se lèvent guère qu'à
l'Évangile, les messieurs jugent bon de rester assis presque toute la
messe, daignent tout au plus se lever à l'Évangile et au moment de
l'élévation (i). Est-ce fatigue, est-ce ennui ou embarras, est-ce ignorance
de l'attitude à observer, est-ce enfin. pour se conformer à un
usage singulier qui laisse au sexe dévot le privilège de s'agenouiller?
Peut-être y a-t-il un peu de toutes ces raisons à la fois. Eh bien! nous
ne craignons pas de dire qu'elles sont sans valeur elles vont à l'encontre
du caractère de prière commune inhérent au Saint Sacrifice
de la messe. Ajoutons qu'elles dénotent une curieuse anomalie avec
les règles de la politesse observées dans la bonne société quel
homme dans un salon se croirait autorisé à s'asseoir pendant qu'une
dame reste debout? Les dames, de leur côté, se reprocheraient d'imposer
un surcroît de fatigue à ceux qui leur rendent honneur. A
l'église, les inconvénients et les manques d'égard ne se produiront
pas si tous consentent à garder les attitudes prescrites.
III. QUELLES SONTDONCLES ATTITUDESQUE DOIVENTPRENDRE
LES SIMPLESFIDÈLESPENDANTLES OFFICES?
Nous ne nous occuperons ici que de la Messe et des Vêpres du
dimanche.
I. Messe. La messe est un drame, d'ordre surnaturel, dont
Jésus, Homme-Dieu, est le principal acteur et auquel tous les fidèles
sont invités à assister comme spectateurs avec une certaine part d'activité
« Là, dit Bossuet, nous devons contempler Jésus-Christ mourant
comme si nous étions présent sur le Calvaire, et nous devons
nous laisser attendrir au souvenir de sa mort (2). » Le spectacle sera
d'autant plus salutaire et profitable à l'âme qu'on y agira en union
plus étroite avec Jésus-Christ et son prêtre. Qu'on nous permette à
(1) Ceciest surtout vrai pour les messes mondaines,messes d'onzeheures ou de
midi, messes d'inhumation, messes de mariage. Aux messes matinales, on voit,
en nos villes de province comme à Paris, les hommes et les femmes à genoux suivant
la messedans leur paroissien.
{i\ 3' Catéchismede Meaux,leçon 2".
.¡-
L'ATTITUDE DU CORPS PENDANT LES OFFICES LITURGIQUES
¿
3
ce propos une réflexion étrangère à notre sujet ceux-là ne paraissent
pas tenir compte du caractère de la sainte messe qui, pendant sa
célébration, font exécuter des chants (cantiques ou motets) ou permettent
de réciter des prières autres que les formules du Saint-Sacrifice
(par ex. le rosaire). Il est heureux qu'une réaction contre de telles
pratiques se soit produite durant ces dernières années n'est-il
pas préférable qu'on en revienne aux pratiques de nos grand'mères
qui disaient leur messe? (c'est l'expression dont elles se servaient)
elles suivaient dans leur paroissiens ou leur eucologe les formules
récitées par le prêtre à l'autel. Egalement louable est la tendance qui
veut associer tous les fidèles aux chants, du moins ceux du Commun,
Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei, dans les messes chantées.
Revenons à l'uniformité que l'Église demande pour l'attitude du
corps nous sommes à un spectacle, il importe que nous nous laissions^
impressionner par les sentiments qu'il fait naître dans l'âme
des spectateurs cette impression dépend pour une large part des
diverses attitudes à prendre.
Quand donc vous assistez à une messe le dimanche ou un jour de
fête, vous vous tenez à genoux pendant les prières que le prêtre récite
au bas de l'autel; puis entre le Sanctus et la fin de la grande élévation
depuis Y Agnus Dei jusqu'après la communion du prêjre;
enfin pour recevoir la Bénédiction. A la messe chantée, la plupart
des chants sont exécutés debout voilà pourquoi les chantres gardent
cette attitude pendant les prières du bas de l'autel, au Sanctus,
à YAgnus Dei. Tout le monde s'assied depuis le moment où le
prêtre monte à l'autel jusqu'à la fin du Gloria in excelsis, quand on
le dit; pendant l'Épîlre, le Graduel, l'Alleluia ou le Trait; pendant le
Credo, sauf à Et incarnatus est; pendant l'offertoire jusqu'à la Préface
enfin après la communion du prêtre jusqu'à la Postcommunion.
L'assemblée se tient debout pour recevoir la salutation du
prêtre, à Dominus vobiscum; pendant la Collecte et la Postcommunion
à l'Évangile; depuis la Préface jusqu'au Sanctus; depuis l'élévation
jusqu'à Y Agnus Dei et enfin pendant le dernier Évangile. Aux
messes solennelles, les fidèles se tiennent debout au moment où le
thuriféraire vient les encenser.
Ces différences d'attitudes bien réglées ont l'avantage d'éviter la'
fatigue et de réveiller l'attention mais surtout elles nous inspirent
les divers sentiments qui doivent prédominer dans l'âme pendant les
phases du drame qu'est la Sainte Messe, commémoration de la scène
du Calvaire. La position agenouillée convient aux prières du bas de
l'autel c'est le moment où le prêtre et ses ministres s'avouent
pécheurs, indignes de paraître devant Dieu, font appel à sa miséricorde.
Cette même attitude exprime l'adoration que nous rendons
à Jésus présent sur l'autel au moment de la Consécration et de l'élévation
elle est en harmonie avec l'humble protestation d'indignité
LES RÈGLES ET LES CEUVRES
formulée dans les paroles du centenier. C'est l'attitude qui convient
pour recevoir la bénédiction finale.
Assis à l'Introït, au Kyrie et au Gloria, nous nous tenons pour
i ainsi dire dans l'attente de l'avènement miséricordieux du Sauveur,
de son entrée en ce monde que nous saluons en union avec les Anges.
Cette même posture pendant la partie instructive de la messe favorise
l'attention, le calme, la docilité avec lesquels il convient de recevoir
la parole divine, puis de la méditer pour en faire la règle de
notre conduite. L'hymne de louange qu'est le Gloria i/i excelsis'
devrait, ce semble, être dite ou chantée debout, comme cela se pratique
pour les diverses hymnes de l'office cependant l'usage de s'asseoir
a prévalu et l'on peut en dire autant du Credo qui, à la messe,
est une profession solennelle de croire à la parole de Dieu entendue
dans l'Évangile qui précède. Quant à l'Offertoire, nous nous asseyons
en mémoire de, ce qui se pratiquait au moment où les offrandes
étaient présentées à l'autel et où se préparait la matière du Sacrifice.
Enfin la position assise après la Communion exprime le repos de
l'âme en possession de son Dieu après qu'elle a eu le bonheur de
communier.
L'Église, en nous prescrivant de nous tenir debout pour le Dominas
vobiscum, veut que nous ayons bien gravé dans l'âme le sentiment de
la présence de Dieu au milieu de nous la pratique de dire les prières
debout, le jour du dimanche, remonte aux premiers siècles; elle
représente l'âme dans un état d'élévation par son union avec Jésus-
Christ ressuscité. Le dimanche est spécialement consacré à commémorer
ce grand miracle de la Résurrection du Sauveur dans lequel
l'homme, relevé de sa chute, a été plus étroitement associé à l'acte de
la prière. Debout à l'évangile, nous donnons une marque spéciale de
respect à la parole de Jésus et montrons que nous voulons être vraiment
pressés de l'accomplir dans nos actes. A la Préface, l'Église
veut nous associer plus étroitement à l'action de grâces que le prêtre
fait monter vers Dieu pour tous ses bienfaits, et particulièrement
pour les grands mystères qui vont se renouveler sous nos yeux elle
nous fait imiter en même temps l'attitude des Anges debout devant
le trône du Dieu trois fois Saint. Debout après l'Élévation, nous som-
-mes dans l'attitude du sacrificateur qui contemple sa victime et se
réjouit à la pensée qu'elle est agréée de Dieu, dans l'attitude du
témoin qui ne se lasse point d'admirer les divines merveilles, dans
l'attitude de Marie au Calvaire c'est alors que nous répétons avec
assurance la prière même de Jésus en nous servant de la formule
qu'Il nous à léguée.
II. Vêpres et Bénédiction du Saint-Sacrement. – L'uniformité
d'attitude qui assume l'efficacité de la prière commune au 'Saint-Sacrifice
de la Messe, il convient que nous l'observions aux autres offices
du dimanche. Aux Vêpres les fidèles sont à genoux pour les prières
L'ATTITUDE DU CORPS PENDANT LES OFFICES LITURGIQUES
préparatoires et pendant les strophes déterminées de quelques hymnes
ils se tiennent debout pendant l'invocation initiale Deus in adjutorium,
puis au Capitule, aux répons, pendant l'hymne, le Magnificat,
l'oraison ou Collecte, l'antienne à la sainte Vierge ils sont assis
pendant le chant des Antienne^ et des psaumes. Ces diverses attitudes
s'expliquent comme pour la messe et sont justifiées par les
mêmes raisons. Nous n'ajouterons qu'un seul mot sur les strophes
de certaines hymnes qui se disent ou se chantent à genoux ce sont
0 Crux ave, spes unica, du Vexilla regis au temps de la Passion; la
première strophe dû Veni Creator à la Pentecôte, le Tantum ergo du
Pange lingua au Saint-Sacrement, la première strophe de l'Ave maris
stella aux fêtes de la sainte Vierge. Cette pratique tend à donner une
marque spéciale d'adoration à la croix ou au Saint Sacrement, de
vénération à Marie en mémoire de la Salutation de l'archange Gabriel
elle marque l'ardeur du désir dans l'invocation de l'Esprit-Saint.
A la Bénédiction du Très-Saint-Sacrement, on se tient à genoux pendant
le chant qui accompagne l'exposition et pendant les strophes du
Tantum ergo et Genitori. D'autres chants extraliturgiques ont été
intercalés pendant lesquels l'attitude à garder, debout ou à genoux,
dépend du caractère de ces chants. Pendant un certain nombre d'années,
la Sacrée Congrégation des Rites prescrivit de se tenir à genoux
cette décision a été rapportée quand on constata qu'elle se basait sur
la réponse à une consultation dont les termes n'avaient pas été suflisammment
spécifiés.
Terminons cet exposé sur l'uniformité dans les attitudes à garder
pendant les offices liturgiques en résumant les avantages qu'elle
assure. Elle nous abstrait de nous-mêmes pour nous unir plus
étroitement à Notre-Seigneur, l'auteur et consommateur de notre foi,
l'âme de notre prière sa puissance d'intercession est à l'autel ce
qu'elle était au Calvaire et Il sait mieux que nous ce que nous devons
demander. La tenue que nous gardons conformément aux indications
de l'Église est aussi un acte de charité à l'égard de nos frères
nous les aidons à mieux jouir du spectacle auquel nous assistons.
Tous les membres de l'assistance, vu la disposition de nos édifices,
ne peuvent pas toujours voir le prêtre à l'autel pendant la célébration
de la messe ils se rendront compte des développements du
drame mystérieux par les attitudes de ceux qui mieux favorisés observeront
les prescriptions que nous venons de rappeler.
Un prochain article traitera du Signe de la Croix pendant les offices
liturgiques.
Farnborough.
J.-L. BAUDOT,O. S. B.