Louis-Ferdinand Céline, Sarkozy et le Grand Paris...
Nicolas Sarkozy a prêché, mercredi 29 avril, à la Cité du patrimoine et de l'architecture, pour la réalisation du Grand Paris avec tous les élus d'Ile-de-France. Il s'est efforcé de les enrôler dans son projet de bâtir la capitale du XXIe siècle et de l'après-Kyoto dans "les dix ans".[...]
Le grand Paris va "bien au-delà des limites de l'Ile-de-France" (jusqu'à Bamako plus précisément. Note de Melki) a-t-il énoncé. "Pour rester au premier rang" des capitales mondiales, "il faut voir loin, il faut voir grand" (et là, il a quand même un handicap! Note de Melki) , a-t-il poursuivi. Pour le chef de l'Etat, Le Havre doit devenir "le port du Grand Paris et la Vallée de la Seine, l'axe autour duquel la métropole a vocation à s'ordonner".M.Sarkozy a ainsi repris à son compte les travaux de l'équipe de l'architecte Antoine Grumbach. M. Sarkozy s'est engagé à "mettre Le Havre (lire Deauville! Note de Melki, c'est vrai, on s'en cogne du Havre !) à une heure de Paris" grâce un train à grande vitesse. "Un projet réalisable d'ici 2015", espère M. Grumbach.
Source : Le Monde, 30/04/2009.
Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massage, 1937 :
"La Seine maritimisante, c'est déjà fort beau, mais ça ne suffît pas!... Non! Non! Non . Je décréterais davantage, il faut amplifier le trafic direction la mer d'une manière très monstrueuse! léviathane! Je décréterais la construction du plus bel autostrade du monde, d'une immense ampleur alors, cinquante mètres de large, quatre voies, direction Rouen et la Manche. Vous voyez ça?... Voila ce qu' ils auraient dû penser! Ça valait un petit peu mieux que toute cette soukerie crouleuse, cette calamiteuse carambouille de bistrots et de "Je-sais-tout-tisme". Et puis encore vingt autostrades que je lancerais vers les falaises, vers les plages, vers le grand air, à partir de Rouen... J'en ouvrirais un éventail, comme on en aurait jamais vu, sur ces paysages... Ils ne demandent que ça entre le Havre et le Tréport! un éventail de vifs accès vers le bonheur, vers les poumons, vers le grand vent, vers les globules, vers la mer!... Des autobus populaires Paris-La Bleue aller et retour: 20 francs... Ça existerait comme travail et comme résultat. Ça serait plus des djiboukeries... Voilà qui aurait du son, du fond, de la couleur, de la durée, du vrai progrès! sans palais, sans toit, sans cloche! Paris, puisque nous en sommes là, est une ville qu'on ne peut plus reconstruire, même plus aménager, d'une façon d'une autre. Les temps des rafistolages, des bricoles, des petites malices, des affûteries sont révolus... C'est une ville qu'a fait toute sa vie, qu'est devenue maintenant toute nuisible, mortelle pour ceux qui l'habitent. Le mieux c'est qu'elle reste croupir en retrait définitif en "touchant" musée, avec tourniquets si l'on veut, une exposition permanente, en arrière des événements, comme Aigues Mortes, Bruges ou Florence... Faut la démembrer tout à fait, lui laisser juste les parties mortes, tout le faisandé qui lui convient. Pour les humains c'est autre chose, ils peuvent pas vivre dans un cadavre... Paris jolie ville croupissante, gentiment agonique entre la noble Place des Vosges et le Musée Carnavalet... Parfait. L'agonie est un spectacle qui intéresse bien des personnes. Vieilllarde fétide qui se disloque en sussurant des choses d'Histoire... La seule banlieue possible d'une ville de quatre millions d'habitants, c'est la mer. La mer seule assez puissante, assez généreuse, pour assainir quotidiennement ce terrible infernal ramassis, cet effrayant conglomérat de pourritures organiques, inhalantes, expirantes, chiatiques, fermenteuses, fébricilantes, virulogènes. La ville la plus malsaine du monde, la plus emboîtée, la plus encastrée, infestée, confinée, irrémédiable c'est Paris! dans son carcan de collines. Un cul-de-sac pris dans un égout, tout mijotant de charognes, de millions de latrines, de torrents de mazout et pétrole bien brûlants, une gageure de pourriture, une catastrophe physiologique, préconçue, entretenue, enthousiaste. Population à partir de mai, plongée, maintenue, ligotée dans une prodigieuse cloche au gaz, littéralement à suffoquer, strangulée dans les émanations, les volutes de mille usines, de cent mille voitures en trafic... [...]
Les humains se traînent dans Paris. Ils ne vivent plus, c'est pas vrai!... Jamais ils n'ont leur compte humain de globules, 3 à 5 milliards au lieu de 7. Ils n'existent qu'au ralenti, en larves inquiètes Pour qu'ils sautent il faut les doper! Ils ne s'émoustillent qu'à l'alcool. Observez ces faces d'agoniques... C'est horrible à regarder... Ils semblent toujours un peu se débattre dans un suicide... Une capitale loin de la mer c'est une sale cuve d'asphyxie, un Père-Lachaise en convulsions. C'est pas de l' "Urbanisme" qu'il nous faut!... C'est plus d'Urbanisme du tout! La banlieue faut pas l'arranger, faut la crever, la dissoudre. C'est le bourrelet d'infection, la banlieue, qu'entretient, préserve toute la pourriture de la ville. Tout le monde, toute la ville à la mer!. sur les artères de la campagne, pour se refaire du sang généreux, éparpiller dans la nature, au vent, aux embruns, toutes les hontes, les fientes de la ville. Débrider toutes ces crevasses, ces rues, toutes ces pustules, ces glandes suintantes de tous les pus, les immeubles, guérir l'humanité de son vice infect: la ville...
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Céline 1 Grumbach 0
Mais, ils ont l'habitude !!
Je pense qu'après avoir écrit ces lignes, il a eu le temps de les regretter dans la magnifique campagne maritime du Danemark où il se cachait des Grumbach !