La révolution est un mouvement physique permanent de rotation complète d’un corps mobile autour de son axe. Dans l’ordre des idées, ce mouvement ne laisse rien à l’état statique, tout change, tout évolue continuellement. Aucune règle, aucune référence n’est fixe. Il n’y a pas de nature humaine, l’homme évolue vers un "état de conscience" supérieur. C’est le mythe du progrès indéfini et inéluctable du fameux "sens de l’histoire". Ce sens de la rotation va de la droite vers la gauche avec un phénomène de cliquet qui permet de passer un cran après l’autre selon un processus non rétrogradable. Il est impossible de jamais revenir en arrière. S’il y a mouvement, il y a un moteur. Quel est le moteur de la Révolution ? Comment fonctionne-t-il ? La physique nous apprend que les moteurs fonctionnent grâce à une différence de potentiel (ddp) et un courant ou débit. Par exemple, un moteur électrique fonctionne grâce à une tension ou différence de potentiels électriques : pôle plus et pôle moins ; grâce aussi à un courant qui passe d’un pôle à l’autre. Un moulin à eau fonctionne grâce à une dénivellation, ou différence de potentiel d’altitude : le haut et le bas et à un courant d’eau qui passe du haut vers le bas. Il en va de même pour le moteur révolutionnaire. Il fonctionne grâce à une différence de potentiels dans l’ordre des idées : thèse/antithèse ; gauche/droite ; moderniste/ réactionnaire. C’est la dialectique qui crée la différence de potentiels. Le courant qui fait tourner le moteur révolutionnaire est la participation au vote démocratique. Peu importe que les réactionnaires votent contre, du moment qu’ils votent, qu’ils participent, ils contribuent à faire avancer la Révolution vers la gauche.
Comprenons bien que la participation de monsieur l’abbé Bisig au dernier synode romain n’a pas empêché le moteur révolutionnaire de tourner, au contraire, il a alimenté la dialectique, donc la différence de potentiels. Les modernistes poursuivent leur révolution, les réactionnaires (toutes tendances confondues qui acceptent le système) la subissent, tout simplement parce le système conciliaire a été imaginé par les théologiens modernistes à Vatican II. Le catholique qui réagit contre la Révolution est souvent trompé par le moderniste, parce qu’il se bat au niveau des idées avec une revue comme La Pensée Catholique, alors que le moderniste se bat au niveau des structures diocésaines pour les noyauter et les changer en groupes réducteurs. Le catholique "réactionnaire" défend ses idées dans une structure révolutionnaire. Il croit naïvement pouvoir changer ainsi les choses. C’est une grave erreur qui explique tous nos échecs.
La secte conciliaire est une mécanique parfaitement au point. Cherchons à en percer le fonctionnement. Comme dans tout groupe humain, il y a une règle du jeu. C’est elle et elle seule qu’il faut refuser jusqu’au bout, jusqu’à la pauvreté, le mépris, la persécution, la mort. La plus évidente preuve du fait que le combat réel se situe ici, c’est la violence, la haine farouche, disproportionnée par rapport à notre faiblesse, avec laquelle l’ennemi nous attaquera si nous maintenons la vérité sans céder d’un pouce. Tant que les catholiques n’attaqueront la secte conciliaire que sur le plan des idées, en acceptant la règle du jeu du Peuple de Dieu qu’elle a inventé, l’ennemi se rira d’eux. Car, alors, ils continueront à "faire son jeu" en feignant de croire que la secte conciliaire est l’Eglise catholique et que le chef de la secte conciliaire est le chef de l’Eglise catholique.
Par contre, si un évêque ou un prêtre en vient à refuser pratiquement cette règle du jeu conciliaire, s’il dénonce ceux qui sont assis sur les sièges épiscopaux comme ne possédant pas l’Autorité (qu’ils ont abandonné eux-mêmes dans la collégialité et la conférence épiscopale), s’il fait remarquer que le nouveau sacre épiscopal n’est pas valide ou au moins douteux, alors c’est la crise, le renvoi, le bannissement, l’excommunication… La règle du jeu refusée, l’on passe de la position d’adversaire idéologique mais de collaborateur pratique à la position d’ennemi déclaré capable de porter à la Révolution les coups fatals qui lui ont été si souvent épargnés par les réactionnaires. Ces coups ne porteront efficacement que si le catholique refuse toute discussion avec les révolutionnaires dans le cadre officiel de la Révolution . La seule solution efficace et durable consiste à rester en-dehors des structures conciliaires pour défendre le fonctionnement divin de l’institution catholique.
Le concile Vatican II fut une véritable assemblée constituante qui produisit une nouvelle société : la secte conciliaire ou le Peuple de Dieu. Et il ne faut surtout pas confondre l’institution de l’Eglise catholique par Notre-Seigneur Jésus-Christ avec la constitution humaine de la secte conciliaire par les évêques réunis en concile et mis en forme de loi par Wojtyla dans Code de 1983. L’institution (in-statuere : établir en soi) divine est intangible, immuable et doit durer jusqu’à la fin du monde car elle repose sur des lois éternelles et sur la volonté de Dieu : « Les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. » La constitution (cum-statuere : établir avec soi) humaine est ponctuelle, circonstancielle, réformable, comme toutes les œuvres des hommes.
En outre, le verbe "constituer" admet le réfléchi : « se ». Un groupe se constitue. On ne dira jamais qu’un groupe s’institue, mais qu’il est institué. Seule l’autorité supérieure institue. L’institution nécessite que l’on reconnaisse au préalable cette autorité supérieure, alors que la constitution peut s’opérer par le groupe lui-même sans autre référence que le consensus ou l’élection. Ainsi, pendant que Moïse reçoit l’institution divine des Dix Commandements de la vraie religion, le peuple se constitue une idole d’un veau d’or par consensus populaire et élit Aaron, le Grand-Prêtre de la vraie religion, chef de la nouvelle religion. La ressemblance avec l’institution divine est très forte, car la nouvelle religion constituée par les hommes revêt les apparences de l’ancienne et conserve le même prêtre, Aaron.
C ‘est analogiquement le drame de la secte conciliaire. La nouvelle religion du Peuple de Dieu a conservé plus ou moins les apparences du sacerdoce mais elle a été constituée par les hommes. Désormais, cette nouvelle société religieuse éclipse l’institution de l’Eglise catholique . Le cœur de notre combat réside dans la défense de l’institution catholique et non dans la défense d’un héros qui appartiendrait encore à la secte conciliaire ou qui la légitimerait.
L’erreur de beaucoup de réactionnaires consiste à n’avoir pas compris que les hommes ont remplacé l’institution par une constitution moderniste et révolutionnaire. Ils se jettent à corps perdu au service d’ un chef de file qui les fait rêver de conquêtes, mais qui ne remet pas en cause les structures constitutionnelles et juridictionnelles de la société qui détruit les principes qu’il prétend défendre.
Si l’on se contente de défendre la "Messe de toujours" sans se préoccuper de la règle du jeu conciliaire, on aboutira toujours dans la secte conciliaire, on n’arrivera jamais au rétablissement de l’institution traditionnelle. « Faire l’expérience de la Tradition » dans les paroisses modernistes de la secte conciliaire revient à condamner la dite Tradition à disparaître définitivement.
La seule solution pour sortir de l’impasse meurtrière de Vatican II est de dénoncer l’imposture de la fausse « église » conciliaire en attendant que l’Autorité de Jésus-Christ, qui a institué l’Eglise, lui redonne le symbole vivant de sa Foi et de son unité : un pape. Alors, et alors seulement, nous serons arrivés à la Tradition.