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 Mgr Le Fer de la Motte, évêque anitlibéral

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Abbé Grossin
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Abbé Grossin


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MessageSujet: Mgr Le Fer de la Motte, évêque anitlibéral   Mgr Le Fer de la Motte, évêque anitlibéral EmptyDim 4 Mar - 22:28

Mgr Le Fer de la Motte fut évêque de Nantes de 1914 à 1935.

Notice du Chanoine ROUL , prêtre du diocèse de Nantes, parue le 15 décembre 1935 dans la Revue Internationale des Sociétés Secrètes de Mgr Jouin. Le Chanoine Roul est décédé en 1970, curé de Saint Similien à Nantes et il avait été secrétaire de Mgr Le Fer de la Motte, tous deux anciens élèves du Séminaire Français de Rome. Le Chanoine Roul était docteur en théologie et en philosophie.

Article du Chanoine ROUL :

« Son Excellence monseigneur Eugène-Louis-Marie Le Fer de la Motte offrait, il y a quelques semaines, en raison d’une santé très altérée, sa démission au Saint-Siège. Le Saint-Siège l’a acceptée, comme il le notifiait le 8 juillet aux Agences et, quelques jours plus tard au chapitre de la cathédrale de Nantes.

Monseigneur Le Fer de la Motte fut le dernier évêque créé par Pie X qui le préconisa au Consistoire du 16 mai 1914. C’est donc pendant 21 ans que le diocèse de Nantes l’a eu pour pasteur. Au cours de ces 21 ans sous son impulsion, une œuvre profonde, plus profonde que bruyante, s’est accomplie, qui mérite d’être évoquée ici. Monseigneur Le Fer de la Motte a été, dans la force du terme UN ÉVÊQUE.

Évêque, il l’était quand, aux jours solennels, dans le chœur grandiose de sa cathédrale, il officiait, lentement, pieusement et quand, au cours des tournées annuelles de confirmation et de visite pastorale sa haute stature, sa dignité, sa patience inaltérable, son affabilité qui n’oubliait personne, ravissaient les populations chrétiennes. Il est certain qu’il a porté très haut, dans son diocèse, le prestige de la dignité épiscopale. Évêque, il l’a été par l’action autant que par le prestige, et l’on retrouve en lui toutes les formes du zèle : zèle de la doctrine, zèle de la liberté de l’Église et zèle des âmes.

Esprit très lucide, très assimilateur, aidé d’une mémoire à certains égards prodigieuse, il était curieux de tout et l’on peut dire que rien ne lui fut étranger. Il pouvait, avec un professeur de rhétorique, disserter sur les classiques grecs, en citer au pied levé de longs passages, tout comme, avec un avocat, discuter les points les plus spéciaux du droit civil…

Mais ce qui frappait, en ses allocutions et ses lettres pastorales, plus que l’originalité et l’ampleur de la pensée, c’en était la précision et la solidité. Au Séminaire Français de Rome et à l’Université Grégorienne, il avait puisé, avec une philosophie et une théologie nullement aventureuses, le culte de la doctrine sûre et authentique, le goût et l’habitude du mot juste, l’horreur de toute équivoque, tant dans l’esprit que dans le langage.

Sous sa plume ou sur ses lèvres, aucune formule suspecte, aucune fantaisie théologique, aucune concession aux principes du jour. Admirablement maître de sa pensée et de son expression, il tenait la doctrine catholique, en ses détails mêmes, pour un dépôt sacré qu’il devait transmettre comme il l’avait reçu, sans diminution ni alliage. Il ne la reléguait pas dans le domaine des abstractions : pour lui, la doctrine avait son mot à dire en tout et elle était, en tout, la première écoutée. Il ne se croyait pas le droit de la modifier au gré de ses désirs, pas même de l’adapter aux besoins des causes successives, amis seulement de l’appliquer avec intelligence et charité.

Exigeant pour lui-même, il l’était aussi pour les autres. Il ne suffisait pas, pour être agréé de lui, d’être un prédicateur à la mode. Il tenait à ne bénir et n’approuver qu’à bon escient. Les bénédictions et approbations en furent plus rares, on pouvait s’en plaindre quelquefois, mais en cet ordre de choses, parcimonie bien comprise ne vaut-elle pas mieux que prodigalité ? Quand il était nécessaire, il rappelait à l’ordre. Voit-il son diocèse menacé par une forme dangereuse de syndicalisme, qui propage les idées fausses et la lutte des classes : il lui barre la route, non par de savantes dissertations, mais par des communiqués simples, pratiques, qui vont droit au but. Il y ajoute, en chaque cas, autant de démarches personnelles qu’il faut… Apprend-il qu’il circule parmi les catholiques, à propos de l’école unique, des thèses et des hypothèses sujettes à caution : il saisit l’occasion d’une assemblée générale de l’association diocésaine des chefs de famille pour prendre clairement, courageusement position ; un article de la Semaine Religieuse de Nantes reprit point par point son allocution : on a pu dire qu’il ne s’est rien publié de plus complet, de plus précis et de plus fortement motivé sur la question… Si, même aujourd ‘hui, penser juste n’est pas trop rare à Nantes, Nantes, pour une bonne part le doit à son Évêque.

A la lucidité de l’esprit et à l’exactitude de la pensée, Monseigneur Le Fer de la Motte joignait, ce qui est plus rare encore, la fermeté du caractère. A une époque où l’on sait si peu ce que l’on veut et où l’on veut si faiblement, où l’on est si prompt à sacrifier le droit et à s’incliner devant le fait, à tourner le dos aux amis et à tendre la mains aux adversaires, où l’on passe si volontiers sans condition l’éponge sur les passés les plus abjects et où l’on se dispense si cavalièrement du devoir de la reconnaissance, il sut être ferme, loyal, fidèle. Une de ses devises préférées : semper fidelis.

Fidèle, il le fut avant tout au Saint-Siège. Il aimait à le dire, et il le pouvait. Est-il un évêque qui fut moins gallican ?et qui ait plus fait pour entrer, et faire entrer son clergé et ses fidèles, dans la vérité de l’esprit romain ? Des paroles augustes, des lettres authentiques resteront qui attestent qu’à Rome on appréciait le résultat de ses efforts. Fidèle, il le fut au passé. Au passé de l’Église : que de fois, par exemple, au cours de ses audiences et visites pastorales, et avec quelle émotion il exalta le souvenir des zouaves pontificaux, vivant et sanglant témoignage de la fidélité française et nantaise au Pape ! Au passé de la France aussi : il ne cachait pas son admiration, sa gratitude pour l’ancienne France et pour ceux qui l’ont faite. Il était, il ne le cachait pas davantage, sans tendresse pour la grande révolution « grande par ses crimes », précisait-il. Il trouvait des mots vengeurs pour stigmatiser les persécutions et spoliations que cette révolution, toujours vivante et semblable à elle-même, renouvelle périodiquement. Et, des effets passant aux causes, il dénonçait sans ambages l’action persévérante et satanique de la franc-maçonnerie.

Fidèle, il le fut, et il tenait à ce qu’on le fût autour de lui, aux amis du présent… Ainsi c’est à lui, pour la meilleure part, c’est à ses directives, à ses manifestations répétées d’attachement et de gratitude personnelle, et surtout à l’esprit général de son gouvernement que la Loire-Inférieure doit, privilège insigne et à peu près unique, d’avoir conservé et ce Conseil Général si digne, si loyal lui aussi à Dieu, à l’Église et à la Patrie, et ces parlementaires catholiques, Marquis de la Ferronnays, Marquis de Juigné, M. Le Cour Grand-Maison, pour en nommer quelques-uns, qui, au milieu de l’universelle confusion du monde politique, sauvent encore ce peut être sauvé des principes, de la morale et de l’honneur catholiques. Dans le diocèse de Nantes comme ailleurs, les tentatives de division n’ont pas manqué : s’il a pu jusqu’ici les neutraliser, c’est à son évêque groupant autour de lui son clergé qu’il le doit. Ce n’est pas un mince mérite.

Monseigneur Le Fer de la Motte tint naturellement à donner l’exemple : il fut dans son diocèse, le premier des défenseurs de l’Église. Ne rien perdre absolument de ce qui a pu être sauvé, récupérer tout ce qu’on pourra de ce qui a été perdu, tel fut son programme ; et il usa à cet effet de toutes les armes en son pouvoir. Il répara comme elles peuvent l’être, chaque fois qu’il en trouva l’occasion, les injustices passées : c’est ainsi que furent rachetés un petit séminaire, une maison de retraite pour les prêtres âgés et infirmes, des presbytères, etc. Il s’attacha à prévenir les injustices nouvelles : par des protestations aussi fermes que mesurées à chaque tentative d’usurpation, par des recours au Conseil d’État, par des procès en forme quand il y avait matière. Il ne redoutait nullement la procédure : « Je ne dors jamais mieux, disait-il, que quand j’ai deux ou trois procès sur les bras. » et il en suivait en technicien tous les détails. Il en gagna plusieurs, et s’il en perdit l’un ou l’autre, il arriva, par exemple pour le procès que lui intentait la société des auteurs et compositeurs de musique, que sa défaite même se transforma en victoire morale.

Il fut particulièrement heureux de rendre à sa ville épiscopale ses traditionnelles processions de la Fête-Dieu. Il les avait rétablies après la guerre. Un arrêté inique du Maire de Nantes les interdit. Il recourut au Conseil d’État qui annula l’arrêté. Pendant les années d’interdiction, d’après le principe qui veut qu’on maintienne son droit contre toute prescription, de magnifiques cortèges D’HOMMES avaient remplacé la procession. Mais quelle joie, quand on revit, dans le cadre incomparable des cours Saint-Pierre et Saint-André, s’avancer l’Hostie Sainte aux mains de l’Évêque vénéré, et quelle émotion pour lui ! Visiblement, quand la foule acclama le Christ et sa Royauté, il ne put retenir ses larmes.

Il avait eu un autre beau jour : le 1er mars 1925, quand, dans la cour de son grand Séminaire, autour de lui, du général Castelneau et du député le Cour Grandmaison, 80.000 diocésains jurèrent de défendre les libertés saintes contre ceux que l’Évêque de Strasbourg, à qui Nantes tendait la main, appelait de leur vrai nom « les persécuteurs de l’Église »…. Courte éclaircie dans un ciel sombre.

(…) L’esprit surnaturel, subordonnant en toutes choses les fins humaines aux fins divines, et les moyens humains aux moyens divins, restera le cachet des œuvres diocésaines dans leur vie journalière comme dans leurs assemblées générales. En faut-il d’autres preuves que ces innombrables cercles d’études, récollections, retraites fermées, auxquelles elles s’alimentent toutes ? Il est des œuvres qui doivent à Monseigneur Le Fer de la Motte, plus que leur esprit : leur existence même.

Il a créé cette œuvre si nécessaire des étudiants catholiques nantais, avec un aumônier qui s’y consacre exclusivement. Et, en quelques années, l’association s’est développée et organisée au point de servir de modèle à d’autres. Une œuvre parallèle d’étudiantes s’est fondée l’an dernier.

Il a créé cette œuvre militaire dont on peut dire, sans nulle exagération, qu’elle est devenue la perfection du genre. Les soldats qui la fréquentent sont si nombreux, malgré les effectifs assez faibles de la garnison, que leur groupe est régulièrement le plus fourni aux journées militaires. L’esprit y est tel qu’ils s’en retournent chez eux non seulement préservés, mais avec une foi plus éclairée et une vie chrétienne plus intense. Des vocations nouvelles s’y découvrent. Et ceux qui lui doivent le plus sont encore les séminaristes-soldats : une année au cercle militaire de Nantes vaut pour eux, a-t-on dit, une année de séminaire.

Enfin et par dessus tout, il a créé des écoles : des écoles primaires, au nombre de plus d’une centaine, si bien que désormais, les deux tiers des paroisses du diocèse possèdent leur école chrétienne de garçons et toutes, leur école chrétienne de filles… Assurément, Monseigneur Le Fer de la Motte a été, en toutes ces fondations, admirablement secondé par ses prêtres et par ses diocésains. Assurément tout n’est pas fait encore. Mais ce qui s’est fait, en l’espace de quinze années, est prodigieux, et l’Évêque de Nantes a été l’âme de cette œuvre dont le Pape (Pie X) a dit qu’elle la première de toutes œuvres. En vérité, y a-t-il bien des diocèses en France qui soient aussi solidement et complètement équipés, et où l’avenir soit, au fond, mieux préparé ?

Celui qui a réalisé tout cela n’est plus aujourd’hui que l’évêque de Jonopolis. Sa carrière est, comme celle de son Maître, couronnée par l’épreuve : il ne peut plus que prier et souffrir « pour les âmes ». Du moins, les âmes qui lui doivent tant, de Nantes et d’ailleurs, n’oublieront pas ce qu’elles lui doivent ! »

Chanoine A. ROUL


Dernière édition par le Dim 4 Mar - 22:33, édité 1 fois
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