Entré au noviciat jésuite de Pau en 1873, Bernard Gaudeau accomplit toutes les étapes de la longue formation jésuite, puisqu'il ne fera son troisième an qu'en 1891-1892 à Castres. Dans l'intervalle, il avait, après ses quatre ans de théologie à Jersey, soutenu ses thèses de doctorat en 1891, l'une sur « Les prédicateurs burlesques en Espagne au XVIIIe siècle », l'autre sur la vie et les oeuvres du P. Perpinien, professeur au Collège romain au début de XVIIe siècle. Professeur de philosophie à l'Institut catholique de Toulouse, puis de théologie à l'Université grégorienne de Rome (1894-1895) et l'Institut catholique de Paris (1896-1899), Gaudeau devient prêtre séculier du diocèse de Tours en 1902. Son statut de missionnaire apostolique lui permet de donner en France de nombreuses conférences et retraites ecclésiastiques. En 1908, il fonde La foi catholique, revue destinée à conbattre le kantisme, soupçonné d'être à l'origine du modernisme: « Cette disjonction de l'idée et de la réalité, qui ne coïncident plus, non seulement entièrement, mais même en un seul point assignable par la raison, c'est le kantisme » (voir La foi catholique, t. I (1908/1), p. 9-25).
La notice relative à Julien Fontaine a déjà expliqué pourquoi les adversaires des modernistes voient en Kant le grand ennemi de la foi catholique. L'abbé Gaudeau n'ajoute pas grand-chose à l'argumentation qu'on trouvera chez Frémont et Fontaine. Mais son réseau d'amis et d'appuis français ou romains, dénote la puissance du courant antimoderniste dans le catholicisme, grâce entre autre à la Sapinière. E. Poulat a recueilli sur le réseau de Gaudeau et les réseaux analogues une documentation considérable, exploitée dans son volume Intégrisme et catholicisme intégral, Castermann, 1969.
Gaudeau ne s'est pas seulement attaqué au modernisme dans le domaine dogmatique, mais il est parti à l'assaut du « modernisme social », en critiquant dans La foi catholique la pensée des Semaines sociales, à laquelle il oppose la vraie doctrine de l'Eglise, expression authentique du droit naturel, valorisant le droit de propriété et les droits de la famille.
Il s'est attaqué aussi à l'Action Française qu'il jugeait sévèrement à la lumière de la Foi.